L'agitateur(trice)

Claude-Jean Antoine, dit Tito

Le festival au cœur

À quelques semaines du lancement du 50e Nancy Jazz Pulsations, du 7 au 21 octobre prochain, le président Claude-Jean Antoine dit Tito, feuillette avec nous le livre d’histoire du festival nancéien.

« Le jazz est une parfaite métaphore de la démocratie : penser ensemble pour construire une œuvre commune ». Claude-Jean Antoine n’a rien perdu de sa fibre militante qui lui a valu dès ses années de lycée son surnom Tito, du nom du fondateur yougoslave du mouvement des non-alignés durant la guerre froide. Lorsqu’il évoque le NJP, dont il est le président, sa grande satisfaction est d’avoir fait du festival « une institution indépendante dans la durée, tout en permettant d’y développer l’aspect social ». C’est là toute l’essence du NJP qui rythme, chaque année à l’automne, les quartiers (Haut-Du-Lièvre, Nations, Champ-le-Bœuf), les écoles, les médiathèques, les communes du Grand Nancy mais aussi les centres de détention, les hôpitaux et les maisons de retraite…

Né à Strasbourg, Tito a vite baigné dans la musique. Son père, clarinettiste d’orchestre, accompagnera, entre autres, Henri Salvador sur scène. Le jeune Claude-Jean pose ses valises à Nancy en 1957 pour des études de Lettres. C’est là qu’il rencontre Jack Lang. Pourtant, ce n’est pas vers le spectacle qu’il se dirige. « J’ai d’abord été commercial chez Allibert à Nancy, une entreprise qui fabriquait des armoires de toilette et des capots de voiture, puis chef de produit durant 18 ans dans une boite qui a lancé le Velcro en France », confie-t-il. Pour ce père de quatre filles, la musique, c’était uniquement le week-end. Avec son ami d’école Jack Lang, il s’investit au sein du CCLU (Centre Culturel Universitaire) et organise des concerts dans un caveau rue de la Commanderie. En 1972, avec son groupe d’amis, il propose au maire de Nancy de l’époque, Marcel Martin, de créer un festival de jazz en automne.

 

Du Velcro au Zénith

En 1973, le premier NJP voit le jour. Durant 10 jours, à la Pépinière, se produisent sur scène Ray Charles, Oscar Paterson, Sun Ra, Claude Bolling, Memphis Slim ou encore Terry Riley. « Avec Xavier Brocker, journaliste, Gilles Mutel, restaurateur longtemps à la tête de La Maison dans le Parc, Roland Grunberg qui fut notre graphiste et moi, soutenus par le maire et son adjoint à la culture Yvan Huq, nous lancions il y a 50 ans le NJP ».

Tito, président des débuts du festival, passe la main en 1977 à Gilles Mutel puis reprend la présidence de 1979 à 1993. « J’ai à nouveau passé la main en 1992. Sous la pression de Jack Lang, qui rêvait d’un Zénith pour Nancy, j’ai porté le dossier auprès d’André Rossinot, maire de Nancy et de son adjoint Gérard Benhamou». Dès la sortie de terre du Zénith, Tito en devient le directeur. Mais en 2008, il revient à ses premières amours et reprend la présidence du NJP.

À quelques semaines du cinquantenaire, Tito a toujours la foi. Durant des années, il a formé un duo étonnant avec Patou Kader, directeur explosif du NJP, lui la force tranquille. S’il n’est pas du genre à regarder dans le rétroviseur, Tito avoue avec satisfaction : « Le modèle du Festival que nous avons créé en 1973 est toujours pertinent. Le NJP est un événement tourné vers un public local et de proximité puisque hors vacances scolaires et qui mise sur la diversité. Comme tous les ans, on nous reproche qu’il y a trop de jazz, ou pas assez. Mais ce qui nous permet de durer c’est le sens de la programmation de Patou Kader et aujourd’hui de Thibaut Rolland ».